LES QUATRE CAVALIERS
Le premier Cavalier monte un cheval blanc comme neige. Son armure
et le caparaçon de sa monture pourraient renvoyer l’éclat de la lumière s’il en
restait. Il mène l’assaut, seul devant. Aveuglant, rapide, armé d’un arc et de
flèches en argent, il arrive par surprise. Il tire
sur une étoile qui, en tombant des cieux, provoque un tremblement de terre et
de gigantesques retombées de pierres et de poussière capables d’ensevelir une
capitale. Si l’étoile s’abîme en mer, elle soulève une énorme vague balayant
tout sur son passage à des lieues à la ronde. Il continue à tirer, il fait
mouche, c’est un Vainqueur. Il tue.
Le second Cavalier fait corps avec un cheval blême. Sans armure,
vêtu d’une longue tunique qui couvre entièrement le caparaçon, homme et bête
sont presque invisibles pour l’œil humain. Il suit son compagnon en dressant
haut sa faux pour exhorter son escorte de gigantesques fauves dressés. La
terreur qu’il inspire est indicible. Il tue. Par tous les moyens. Faux, épée,
morsures, piqûres. Il tue. Il suscite famine et épidémie. Il tue. C’est la
Mort.
La Mort entraîne dans son sillage le troisième Cavalier. Celui-ci
caracole sur un cheval noir comme l’obscurité des Enfers. Son
armure et le caparaçon de son alezan renvoient les reflets du Néant. Nul ne
peut le regarder sans être réduit en poussière, anéanti. Il tient une balance
pour peser son dû d’âmes, de blé et d’orge. C’est un Voleur. Il assiste la
Mort. Il pille. Il provoque famine et épidémie. Il tue.
Le quatrième Cavalier ferme la marche sur un cheval rouge feu. Son armure et le caparaçon de son destrier
font surgir les flammes de l’Enfer. Le voir est une torture. Il est armé d’une
épée incandescente. Il a le pouvoir d’inciter les hommes à s’entretuer. De son
épée, il trace un trait de feu au sol, qui sépare les rares survivants en deux
camps opposés. Les uns se jettent alors sur les autres, sans raison, pas même
celle de se disputer le dernier grain. Il sème la discorde. Il tue.
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